LECTURES VAGABONDES

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William Wilkie Collins : Mari et femme/ Pour le meilleur… et surtout pour le pire !

 

 

          C’est qu’il en faut, du courage, pour se taper les 750 pages de ce roman écrit en 1869 par William Wilkie Collins et intitulé Mari et femme. L’œuvre a paru en 2002 aux éditions Phébus.

 

          Blanche Lundie et Anne Silvester sont d’inséparables amies, autant que le furent leurs mères respectives. Cependant, alors qu’elles ont l’âge de se marier, elles vont être la proie d’un imbroglio sentimental qui va révolutionner leur vie. Anne Silvester est amoureuse du cynique Geofrey Delamayn et, alors qu’elle a déjà couché avec lui, le somme de l’épouser. L’affaire doit se régler dans une auberge discrète. Cependant, Geoffrey Delamayn n’est pas très embalé à l’idée d’épouser une femme qui n’est pas spécialement un bon parti. Alors que son père est au plus mal, Il demande à son meilleur ami, Arnold Brinkworth, de se rendre à l’auberge pour expliquer à Anne qu’il va falloir attendre un peu pour le mariage.

Pour éviter de compromettre Anne vis-à-vis des patrons de l’auberge, Arnold se fait passer pour son mari afin de la rencontrer sans créer d’ennuis.

Il ne se doute pas qu’il est parti pour une grosse galère car en Ecosse, cette simple parole le désigne réellement comme époux d’Anne. Or Arnold est amoureux de Blanche et souhaite l’épouser. La chose devient donc impossible car Arnold est désormais l’époux d’Anne et Geoffrey, trop content de se débarrasser ainsi de la jeune femme, refuse d’intervenir pour libérer son ancien meilleur ami d’autant plus qu’il envisage d’épouser Mrs Glenarm qui s’avère être un excellent parti. C’est alors qu’une lutte entre deux partis s’engage : ceux qui soutiennent le mariage selon les lois écossaises, à savoir Anne et Arnold, et ceux qui désapprouvent la chose et veulent qu’Arnold épouse sa bien-aimée Blanche. Après maintes manœuvres des uns et des autres et particulièrement de Sir Patrick Lundie, l’oncle de Blanche, le faux mariage est annulé et Geoffrey se voit contraint d’accepter Anne comme épouse, puisque leur relation est désormais portée à la connaissance de tous. Geoffrey envisage de se débarrasser au plus vite de cette encombrante épouse sans intérêt. Pour ce faire, un seul moyen : la tuer. Il charge Hester Dethridge, sa logeuse, de l’affaire ; en effet, celle-ci a autrefois assassiné son époux et Geoffrey, qui a découvert ce secret, fait pression sur elle et la force à commettre ce nouveau crime. Mais Hester, dans un moment de rage et de folie, tue Geoffrey. Ainsi, les mariages peuvent désormais s’envisager sereinement : Anne épousera Sir Patrick et Blanche, Arnold Brinkworth.

 

          Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce roman de William Wilkie Collins intitulé Mari et femme, est long, très long à lire. Certes, le nombre de pages est impressionnant, mais la sensation de longueur n’est pas seulement due à ce fait car l’intrigue évolue lentement, au fil des rencontres et des discussions des différents personnages : ainsi, comme dans un jeu de stratégie ou d’échecs, chaque protagoniste avance alors ses pions pour arriver à un résultat qui sera peut-être annulé par la rencontre et la discussion suivantes.

          Certes, très vite, le lecteur a la sensation d’avoir entre les mains une œuvre pas comme les autres car hybride entre le roman et la pièce de théâtre. La structure d’ensemble repose sur une succession de scènes qui donnent l’impression de vivre l’intrigue en temps réel. William Wilkie Collins utilise très peu la technique du sommaire ou résumé qui varie le rythme de la narration et l’accélère. D’ailleurs, il suffit de se rendre à la table des matières pour se rendre compte du découpage théâtral du roman, bâti sur un prologue, puis seize scènes, et enfin, un épilogue. Chaque partie porte un titre qui correspond au nom du lieu dans lequel se déroule la rencontre et la discussion : Windigates, la maison de Sir Patrick, Fulham….

          Mais parlons un peu du contenu de l’œuvre. Mari et femme comporte une satire sociale : celle de la société victorienne à la fin du XIXème siècle. William Wilkie Collins est sensible à la condition de la femme dans le mariage qui ressemble à un carcan étouffant aux règles rigides. A travers le principe du mariage à l’écossaise, on discerne parfaitement la soumission de la femme qui ne peut se rendre nulle part seule (car alors, elle serait considérée comme une femme de petite vertu). Voilà pourquoi Arnold Brinkworth, dans un élan altruiste, se fait passer pour le mari d’Anne dans l’auberge où elle attend Geoffrey Delamayn.

          Mais en cette fin de XIXème siècle, William Wilkie Collins constate aussi l’avènement de nouvelles valeurs : si Sir Patrick Lundie incarne l’aristocrate lettré et raffiné, Geoffrey Delamayn représente la montée de nouvelles valeurs critiquées par l’auteur : le sport et le physique priment désormais sur la culture et sont associés à la brutalité et à l’absence de moralité puisque Geoffrey n’a aucun état d’âme lorsqu’il s’agit d’envisager l’assassinat d’une femme qui fut sa maîtresse.

          Ainsi, si la lecture de Mari et femme offre un intérêt certain, elle est aussi souvent rébarbative en considération de la longueur et de la composition de l’ensemble. Pour cette raison, je suis loin de crier au chef d’œuvre comme le fait Michel Le Bris dans la préface. Si William Wilkie Collins a pu inspirer Charles Dickens, il est loin de posséder la notoriété de ce dernier, et ce, pour la simple raison qu’il est moins génial que ce dernier.



23/08/2020
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