LECTURES VAGABONDES

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Robert Harris : Pompéi / pompant !


C’est sans doute par nostalgie du beau soleil du sud italien, alors que nous sommes encore en plein hiver, et  en souvenir de la magnificence de la baie de Naples que j’ai eu envie de me laisser aller à un voyage dans l’espace et le temps en compagnie du best-seller de Robert Harris paru en 2004 aux éditions Plon : Pompéi.

Depuis qu’il a pris ses fonctions en tant qu’aquarius de Campanie (son prédécesseur, Exomnius, ayant mystérieusement disparu), Attilius a un gros souci : l’aqueduc de l’Aqua Augusta est sans doute endommagé au niveau de la ville de Pompéi, puisqu’en aval, il n’y a plus d’eau. Visite chez Pline l’Ancien, amiral, pour se procurer un bateau afin de se rendre au plus vite à Pompéi. Visite chez Ampliatus, ancien esclave affranchi devenu richissime, pour se procurer hommes et matériaux afin de réparer l’aqueduc : Attilius tombe subitement amoureux de la fille de ce dernier, Corélia. Réparation de l’aqueduc. Cependant, le Vésuve donne des signes inquiétants : des cendres semblent s’échapper de son cratère. Attilius grimpe au sommet, découvre son prédécesseur mort au niveau du cratère et décide de se rendre au plus vite à Misène afin de convaincre Pline l’Ancien d’affréter des navires pour secourir la population qui ne tardera pas à subir la catastrophe d’une éruption du Vésuve. Cependant, l’irrémédiable est en marche : le bateau de Pline est pris dans une marée de pierres ponce et doit s’arrêter au niveau de la plage de Stabies. C’est à pied qu’Attilius poursuit son voyage vers Pompéi, alors que la baie est en plein chaos. Il parvient à sauver in extrémis Corélia de la mort tandis que le reste de la famille reste figé dans l’incandescence soudaine venue du Vésuve.

Le roman Pompéi restitue la célèbre éruption du Vésuve qui figea la ville antique sous les cendres ; l’intrigue se déroule donc sur quatre jours : du Mardi 22 Août 79 (deux jours avant l’éruption) au Vendredi 25 Août (dernier jour de l’éruption). Les deux tiers du roman sont consacrés à la course contre la montre d’Attilius pour réparer l’aqueduc de l’Aqua Augusta : les villes ne peuvent en effet se passer bien longtemps d’eau. Le dernier tiers est consacré à l’évocation de l’éruption du Vésuve, vue d’abord de l’extérieur de Pompéi, puis de l’intérieur, au moment ultime de la déflagration.

Robert Harris nous livre sans doute un roman soigneusement documenté… sans doute trop, car l’intrigue romanesque semble être un prétexte à la restitution historique des derniers jours de Pompéi. Ainsi, la première partie est du roman est consacrée aux signes avant-coureurs de l’éruption : le sol bouge, si bien que l’aqueduc est endommagé. Quel ennui que toutes ces pages consacrées à l’aqueduc, sa constitution, ses matériaux et tout le toutim ! Ensuite, une fois l’aqueduc réparé, nous voilà replongés dans de longues descriptions de l’éruption : panache de fumée, de cendres, pluies de pierres ponce…. Bref, bien plus qu’à un roman, avec Pompéi, nous avons affaire à un docu-fiction assez ennuyeux sur les aqueducs romains et l’éruption volcanique du Vésuve.

Cependant, Robert Harris ne laisse pas de côté la ville de Pompéi à ses dernières heures : c’est l’aspect le plus intéressant du roman. Nous avons affaire à une ville corrompue, opulente et décadente : à travers le personnage du parvenu Ampliatus qui tient les rênes de la ville, Robert Harris décrit une somptueuse villa pompéienne, un banquet opulent et de très mauvais goût, des quartiers commerçants bigarrés, des ruelles sombres aux lupanars florissants…

Quant à l’intrigue amoureuse qui unit Attilius et Corélia, on n’y croit pas un instant ! Elle n’est qu’accessoire tant le personnage de Corélia est secondaire, tant Robert Harris est affairé à ses histoires d’aqueducs brinquebalants… On ne peut pas être au four et au moulin ! Alors, quand besoin est pour Ampliatus d’un motif de retour à Pompéi au moment où il vaudrait mieux fuir la catastrophe, Robert Harris sort de son chapeau l’intrigue amoureuse !! Il faut sauver Corélia comme on sauve le soldat Ryan. Bref ! De plus, on se demande vraiment si, avec le personnage d’Attilius, on a affaire à un ingénieur des eaux ou à Hercule ! Quatre nuits sans dormir, à courir à droite et à gauche pour réparer l’aqueduc, puis à gauche et à droite pour retrouver Corélia ! Sans compter la réparation du tunnel de l’aqueduc dont Attilius se charge quasiment tout seul ! Fichtre !  

Enfin, l’ensemble du roman est basé sur les images d’Epinal qui collent à la ville de Pompéi : une ville opulente, trop affairée aux plaisirs et à la corruption pour se soucier des signes avant-coureurs de l’éruption, Pline l’Ancien occupé à décrire et noter le phénomène volcanique depuis son bateau prisonnier d’une marée de pierres ponce, l’ultime moment qui fige sur place des corps dans la cendre, immortalisant ainsi la dernière seconde de vie à Pompéi, le personnage d’Ampliatus, un véritable copié-collé de Trimalcion, célèbre esclave affranchi du Satiricon de Pétrone.

Mais finalement, tous ces reproches que j’adresse au roman de Robert Harris, Pompéi, étaient prévisibles et on peut tout aussi bien y voir des qualités : le roman restitue fidèlement les derniers jours de Pompéi et c’était sans aucun doute là le but de Robert Harris. Cependant, peut-être, le sujet est-il traité de manière aride, car en définitive le lecteur a plutôt envie de plonger dans le quotidien d’une ville antique à la fin tragique et certainement pas dans un traité historico-scientifique sur les aqueducs romains et les éruptions volcaniques…

En réalité, il en va de ce roman comme de la visite que j’ai effectuée à Pompéi : je me fiche du Vésuve et de son éruption qui n’est qu’accessoire : elle a servi à figer pour longtemps le quotidien d’une ville antique dans des détails qu’on ne trouve nulle part ailleurs. C’est ce quotidien qu’on veut découvrir lorsqu’on visite Pompéi. Or, Robert Harris, à mon sens, laisse beaucoup trop de place au Vésuve et aux aqueducs qui déconnent et pas assez à la ville lumineuse secouée par de sombres intrigues vénales. Dommage ! Ce n’est pas un mauvais roman… c’est juste un roman qui m’a terriblement ennuyée ! Ce qui est peut-être pire ! Quelle fin tragique que celle de ce roman Pompéi ! 



23/06/2012
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