Saskia Noort : D’excellents voisins/Pas mal, sans être excellent.
Les relations de voisinage ! En voilà une bonne idée – même si elle n’est pas nouvelle – pour un thriller psychologique (harcèlements qui vont crescendo) ! C’est le défi que tente de relever Saskia Noort dans ce roman intitulé D’excellents voisins, paru en 2011 aux éditions Denoël.
Malgré un acharnement thérapeutique afin de concevoir un enfant, Peter et Eva ont échoué à donner la vie. Leur bébé – Lieve – est mort à la naissance. C’est donc sans leur petite fille que Peter et Eva prennent possession de la maison qui aurait dû accueillir la famille toute entière. Dans cette banlieue pavillonnaire près d’Utrecht, Eva et Peter font connaissance de leurs voisins, Steef et Rebecca qui ont un bébé, un fils nommé Sem. Très vite, la sympathie unit les deux couples. Cependant, Steef et Rebecca sont assez libertaires et lorsqu’une nuit, l’alcool aidant, Eva se retrouve entre les bras de Rebecca et de Steef, Peter devient jaloux. Il faut dire que niveau sexe, Eva et Peter ont des problèmes : à force de faire l’amour pour vouloir un enfant, la chose devient pénible et sans spontanéité. Disons-le tout net, Eva ne désire plus Peter, ce qui le frustre et le fait souffrir. Pendant quelques temps, Peter est jaloux et ne veut plus entendre parler de Steef. Mais il suffira d’un concert de rock auquel les deux hommes assistent, quelque peu sous l’effet de l’ectasie, pour qu’ils redeviennent amis. Or, Steef a aussi des zones d’ombre : il a tué un homme non armé alors qu’il était dans le cadre de ses fonctions de policier. De ce fait, il est parfois harcelé par des amis ou de la famille du défunt. Par ailleurs, ce dernier est bien décidé à apprendre à Peter à tirer au pistolet. De leur côté, les femmes, qui se confient l’une à l’autre mettent au point un plan pour donner une chance à Eva de tomber enceinte. Il suffit d’organiser une partie à quatre et Steef, qui n’est pas stérile, pourrait donner son sperme involontairement. L’affaire se conclue comme les deux femmes l’ont prévu, sauf que Peter est très jaloux du plaisir qu’Eva semble prendre avec Steef. Lorsqu’elle apprend qu’elle est enceinte, c’est la pagaille. Surtout à cause de Steef qui s’est senti grugé dans l’affaire. Il n’a absolument pas envie d’être de nouveau père, pas même père biologique. Effrayée par la brutalité de l’homme, tandis que ses sentiments pour son mari Peter s’évanouissent, la jeune femme s’enfuit et trouve refuge au domaine De Kempervennen. Mais très vite, les trois autres la retrouvent et c’est le bain de sang : seul le petit Sem aura la vie sauve.
D’excellents voisins est un roman sympa à lire, surtout au début. La fin est plutôt ratée, néanmoins. Voyons donc.
Le roman alterne les parties consacrées à Eva et celles consacrées à Peter, son époux. Elles permettent de montrer et de rendre sensible le malentendu et l’absence de communication qui se sont peu à peu insinués au sein du couple ; l’un ne vit que pour la musique – Peter – tandis que l’autre ne rêve que d’avoir un enfant. Bref, c’est le portrait d’un couple en pleine explosion qui nous est présenté. Il semblerait que la perte de la petite fille tant désirée – Liebe – soit à l’origine de la dégradation des liens entre Eva et Peter. Après tant d’années et de tentatives pour tomber enceinte, Eva doit se résigner : elle ne portera jamais un autre enfant. Peter semble davantage convaincu par l’adoption et il garde au fond de lui un certain malaise du fait que leur petite fille décédée a été conçue par un don de sperme.
La seconde raison qui fait exploser le couple vient du contact avec les voisins libertins : Steef et Rebecca. Très vite, ces derniers ont l’ambition d’initier Eva et Peter au libertinage, initiation qui se passe mal pour les deux. Si Eva fait semblant d’aimer la chose, c’est parce qu’elle espère tomber enceinte de Steef qui n’est pas stérile. Peter, de son côté, s’il semble de plus en plus excité par toutes les nouveautés qu’il découvre, il est aussi très jaloux du fait que Steef pose la main sur Eva.
Par ailleurs, D’excellents voisins, c’est aussi un roman qui traite des hommes et des femmes au sein du couple. Dans le fond, il brosse un tableau assez conventionnel des relations entre époux, même si les personnages s’adonnent quelque peu à la drogue et au libertinage. Cette pseudo liberté n’est qu’apparente. Steef et Peter sont finalement bien machos ; l’un est violent, aime les armes, refuse de donner son sperme ; l’autre est jaloux, aime le rock’n’roll et refuse que sa femme puisse porter l’enfant d’un autre. De leur côté, les femmes se résignent et supportent les décisions de leur mari. Jusqu’au jour où, petite révolution, elles se mettent à comploter pour qu’Eva puisse réaliser son rêve de concevoir un enfant.
Malheureusement, la fin du roman est granguignolesque et peu crédible. En fuite, Eva est retrouvée – on se demande bien comment – par les trois autres personnages. Steef et Peter sont armés et sans même avoir au préalable discuté, c’est la tuerie. Certes, elle est annoncée dès le début, puisque le roman est construit sur un flash back ; cependant, s’attendait à une montée en tension plus forte et plus justifiée.
Reste que D’excellents voisins est un roman original et plaisant à lire. Et pour qui aime le rock’n’roll, il regorge de paroles de chansons – U2, Pink Floyd et bien d’autres qui rythment les états d’âme de Peter – en anglais, pas traduites ! Quel plaisir !
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