Brady Udall : Le destin miraculeux d'Edgar Mint/Un fabuleux destin !
Voici un roman qui a trainé un bout de temps dans les cartons avant d'être lu. Si, au départ, la couverture et le titre ne m'inspiraient guère, j'ai vite été conquise par Le destin miraculeux d'Edgar Mint, écrit par Brady Udall et paru en 2001 aux éditions Albin Michel.
Le petit Edgar ne semble pas très verni dans la vie. Alors qu'il est encore un jeune enfant, le facteur lui roule sur la tête avec son camion de livraison. C'est dans un état critique qu'il est envoyé à l'hôpital de Sainte-Divine, dans l'Arizona. Là, il passe un premier temps dans le coma. Mais un jour, alors que tous pensent son cas désespéré, il se réveille et petit à petit revit. Il se lie avec ses compagnons de chambre, Art et Jeffey. À l'hôpital, il est caliné et passe son temps à lire, à taper à la machine à écrire – une Hermès Jubilé. Cependant, le médecin qui lui a sauvé la vie, Barry Pinckley, renvoyé de l'hôpital, revient régulièrement passer un certain temps auprès du petit rescapé miraculeux. Alors qu'Edgar resterait bien sa vie entière à l'hôpital de Sainte Divine, on le place dans l'école où travaille son oncle Julius : l'école Willie Sherman, une école pour Apaches. En effet, Edgar est un métis : son père, Arnold Mint est un cow-boy qui a abandonné sa mère, Gloria, une indienne rencontrée dans un rodéo. A Willie Sherman, Edgar est maltraité, notamment par ses camarades de classe : Dents Pourries, mais aussi et surtout Norman Nelson. Il est battu et il subit toutes sortes de sévices plus ou moins dégradants. Cependant, il se lie aussi d'amitié avec Cecil. Cette amitié sera tellement forte que Cecil éloignera Nelson en le tuant avec des flèches. Résultat : Cecil est envoyé en prison. Peu à peu, les autres élèves méchants quittent l'école... même le directeur, Mr Whipple, s'en va alors que son épouse le trompe. D'autre part, Edgar apprend la mort de sa mère par le biais du docteur qui l'a sauvé et revient régulièrement dans sa vie : Barry Pinckley. Après une tentative de suicide râtée, Edgar est pris en charge par des mormons qui lui veulent du bien, le trouvent exceptionnel et le font entrer de plein-pied dans leur religion. C'est alors qu'Edgar est placé dans un famille mormonne qui vit non loin de Salt Lake city, dans l'Utah : la famille Madsen qui lui donne beaucoup d'affection au point de songer à l'adopter (le père, c'est Clay, la mère, Lana). Cependant, leurs enfants, Sunny et surtout le petit Brayton, ne voient pas cette initiative d'un bon oeil. De son côté, Edgar n'a pas envie de prendre la place d'un enfant défunt que Clay et Lana ont eu : le petit Dean. Et puis, le docteur Barry Pinckley revient voir Edgar, un jour, et entame une liaison avec Lana, la mère. Afin de sauver la famille Madsen du naufrage, Edgar demande à Barry de l'emmener loin de l'Utah. Cependant, il n'a guère envie de se retrouver avec cet ancien médecin devenu toxicomane. Alors, tandis que ce dernier somnole, il lui injecte suffisamment de drogue pour le tuer. Pour se débarrasser du corps, il fait appel à Art, son compagnon de Sainte Divine qu'il retrouve à cette occasion. Avant de mourir, le docteur Pinckley a donné à Edgar les coordonnées du facteur qui lui avait roulé sur la tête. Il s'appelle Nicholas Petenko et habite en Pennsylvanie. Il faut dire qu'Edgar s'était mis en tête d'aller révèler à l'homme qu'il était bien vivant ! Et c'est ce qu'il fait. Sauf que Nicholas Petenko est mort. C'est sa femme qui accueille Edgar et lui révèle qu'elle et son mari étaient sur le point de l'adopter lorsque s'est produit l'accident. Et c'est ainsi qu'Edgar trouve enfin sa vraie famille auprès de Rosa Petenko. Il fera sa vie en Pennsylvanie et nous le quittons lorsque Rosa décède. Edgar, de son côté, s'est marié avec une certaine Mitzi qui a deux enfants. Il est devenu journaliste et n'a jamais quitté sa machine à écrire, l'Hermès Jubilé.
Le roman raconte la vie du petit Edgar entre deux bornes temporelles qui sont l'accident qui a provoqué son coma et les retrouvailles avec celle qui devait devenir sa mère au moment de l'accident. C'est cette parenthèse mystérieuse où un enfant mortellement blessé va ressusciter et vivre alors sans passé, qui est racontée. Qui était Edgar avant l'accident ? Edgar ne s'en souvient pas. C'est pourquoi il parle de cet enfant-là à la troisième personne du singulier, comme s'il était un autre que lui. D'ailleurs, si la majeure partie du roman est écrite à la première personne du singulier (je), de temps à autre, Edgar se met à distance de lui-même en parlant de lui à la troisième personne du singulier, comme s'il n'était jamais tout à fait lui-même depuis l'accident. C'est pourquoi, dans la dernière partie du roman, il part à la recherche de celui qui a provoqué l'accident, comme s'il pressentair que cet homme qui a fait basculer son destin peut seul apporter une réponse aux questions qu'il se pose. Ceci dit, objectivement, c'est pour apporter la paix à cet homme qui croit être un meurtrier qu'il fait cette démarche. Mais c'est bien Edgar qui va alors renouer le fil interrompu de son destin et trouver enfin la paix auprès d'une mère aimante.
Parlons donc de cet accident qui vaut à Edgar de vivre une grande partie de son enfance à être trimbalé à droite et à gauche, privé de véritable famille. Car sa mère biologique – Gloria - est alcoolique et incapable d'élever son fils ; quant à son père, il a fichu le camp. Edgar trouvera quand même de l'affection chez les Madsen et à l'hôpital de Sainte-Divine, auprès des patients – notamment Art – et des infirmières. Et n'oublions pas ce père symbolique et totalement farfelu – qui s'autoproclame père d'Edgar (ce denier n'apprécie d'ailleurs pas ses constantes irruptions dans sa vie) le docteur Pinckley. Disons donc qu'Edgar est un petit orphelin qui verra disparaître sa famille originelle : sa grand-mère et sa mère, mais aussi son meilleur ami, Cecil.
Pourtant, Le destin miraculeux d'Edgar Mint n'est jamais triste. L'histoire d'Edgar est racontée de manière truculente et amusante, même dans ses plus durs moments. A plusieurs reprises, ce roman m'a fait penser à du John Irving dans ses meilleurs pages. Edgar est un enfant qui fait penser à certains héros enfantins d'Irving comme Garp, mais aussi le petit Omer Wells de L'oeuvre de Dieu la part du diable.
Enfin, Le destin miraculeux d'Edgar Mint, c'est aussi un fabuleux périple dans l'ouest américain – de l'Arizona à l'Utah) en compagnie des Apaches (en effet, Edgar est un sang mêlé). Dans la seconde partie du roman consacré à l'école Willie Sherman, on appréhende davantage les difficultés que peut avoir la communauté indienne en proie à l'alcoolisme, au racisme, livrée à une mauvaise édudation qui engendre la violence et qui génère des analphabêtes. Par ailleurs, les indiens sont ostracisés : l'école de Willie Sherman leur est consacrée et c'est une école délabrée où bagarres et brimades sont le lot quotidien.
Ainsi, Le destin miraculeux d'Edgar Mint est un roman assez génial, plein de rebondissements et d’émotions. Et à l’instar de celui d’Amélie Poulain, le destin d’Edgar Mint est aussi fabuleux !
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