Nicolas Rey : Vallauris plage / à ne lire ni à la plage, ni ailleurs.
Vous ne pouvez pas savoir à quel point je suis heureuse d’avoir enfin achevé ce roman-fatras de Nicolas Rey, intitulé Vallauris plage et paru aux éditions Grasset en 2006. Quel pensum !!
Allons-y pour le pitch comme dirait le digne ami de Nicolas Rey : le très parisien Thierry Ardisson.
Franck Bastide est en prison : il a commis un meurtre. Il se confie à Candice, son avocate. Il a tué par amour ; par amour pour la belle Arianne Backer, sa colocataire. Celle-ci a un amant : Paul Fillacci, médecin marié à la belle Françoise. Notre héros se contente donc d’aimer Arianne en silence. Il n’est pas le seul à être fasciné par la jeune fille : Manuel, employé à la SNCF, le vieux major Crawford sont également sous le charme d’Arianne. Tout ce petit monde se retrouve à Vallauris plage, le temps d’un été. Voilà : c’est à peu près tout.
Quelques mots des personnages, car ce sont leurs confidences qui sont le nerf de guerre du roman.
Manuel est amoureux d’Arianne : c’est lui qui fournit en cocaïne tout le petit groupe.
Le major Crawford est vieux et impuissant : il passe son temps à injurier la vie et le monde.
Françoise est la femme de Paul, l’amant d’Arianne : c’est une bourgeoise qui cherche un sens à sa vie à travers la philosophie bouddhiste.
Paul est tiraillé entre son attachement pour sa femme et son amour pour Arianne.
Reste Franck Backer, le héros : il boit, prend des médicaments, puis finit par se tirer de somptueuses lignes de coke. Ah oui !! J’oubliais ! Il a de gros problèmes de gencives : ses dents sont quasiment irrécupérables… Pas très ragoûtant, tout ça.
Quant à Arianne : elle est très amoureuse de Paul, mais se tape également d’autres types dans les bars et les boîtes branchées de la côte d’azur.
Alors voilà, tout ce petit monde se croise et se décroise : Franck recueille les confidences des uns et des autres : les confidences d’êtres en perdition, livrés au désarroi d’une vie ratée, qui ne trouvent d’intérêt qu’à la biture et à la coke. Arianne est censée être le centre de leurs préoccupations, mais la jeune fille est singulièrement absente du roman : peut-être Nicolas Rey a-t-il voulu faire un remake de L’Arlésienne ? Sauf que… Arianne n’existe que très peu dans les pensées des personnages qui sont censés l’aimer. Bref : la jeune fille belle et fascinante qu’a voulu évoquer Nicolas Rey n’est qu’une poupée gonflable plutôt dégonflée. Seule scène où elle agit : au festival de Cannes, elle baise avec un producteur et dans le feu de l’action, lui bouffe un doigt.
Des scènes grotesques de cet acabit, il y en a bien d’autres dans ce roman qui accumule les inepties. Je songe ici à la fantastique scène d’accouchement-live à laquelle on a droit vers la fin du bouquin. La fille du major Crawford débarque de nulle part avec ses piercings et son polichinelle dans le tiroir. Elle frappe à la porte du Vallauris plage : vite, vite ! La jeune femme perd les eaux. Paul, le médecin, procède à l’accouchement sur une table du bar… Je ne sais pas où Nicolas Rey a eu l’idée de ce scénar : peut-être dans plus belle la vie ou dans sous le soleil ?
Et le meurtre, me direz-vous ? Beh ! Il faut bien conclure… alors, à la fin, sans préméditation, Franck tue Françoise. Il veut libérer Paul de son épouse afin de faire le bonheur d’Arianne, celle qu’il aime à la folie. Cependant, rien dans le roman ne laissait présager une telle fin. L’idée du meurtre prend notre héros comme une envie de pisser. Et c’est bien ce qu’on peut reprocher à ce roman : de n’avoir aucune ligne directrice, d’accumuler gratuitement des propos déprimants, des scènes de biture et du trash : baise, accouchement, bouffage de doigts, évocation d’une dentition en pleine décrépitude (caries, dents pourries et haleine de phoque) : du sordide pour le sordide, du trash sans profondeur.
Enfin, aucun de tous ces personnages à la dérive ne suscite l’émotion du lecteur ; avec cette accroche en quatrième de couverture : « comment devenir un assassin par amour, le temps d’un été », on s’attend à l’histoire d’une passion mortelle à l’engrenage tragique. Pouah ! Quel échec sur ce point-là ! Rien de tout ça. Le meurtre final, on n’y croit pas.
Ainsi donc, mieux vaux tourner la page sur ce roman débile et insignifiant de Nicolas Rey qui ne fait qu’accumuler les digressions sur des thèmes à la mode dans les milieux parisiens. On oubliera donc bien vite cette histoire d’amour insensée, fadasse et mal sentie : d’ailleurs, je suis bien déçue par le manque d’imagination de Nicolas Rey ! Dans ce type de roman à la Houellebecq ou à la Beigbeider, on trouve souvent quelques tarlouzes sur le retour qui se tapent de jeunes camés dans les chiottes d’un bar gay. Au moins, Nicolas Rey nous aura épargné ça !
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