LECTURES VAGABONDES

     Jojo Moyes. Le prénom de cette écrivaine ne me dit rien que vaille. Mais point de préjugé à l’emporte-pièce. La quatrième de couverture promet un moment d’émotion intense et de gourmandise littéraire tant est grand le talent de Jojo Moyes. Ainsi parait en 2013, aux éditions Bragelonne - Milady, un roman intitulé Avant toi.

          La jeune Louisa Clark vient de perdre son emploi de vendeuse dans une boulangerie. Cependant, pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille qui ne roule pas sur l’or, elle accepte de devenir aide-soignante auprès d’un tétraplégique : Will Traynor. L’homme, fauché par une voiture quelques temps auparavant, n’a plus l’usage de ses membres et se montre particulièrement odieux avec son entourage. Cependant, peu à peu, Louisa réussit à l’amadouer. Mais un jour, la jeune fille découvre que Will a l’intention de se rendre chez Dignitas, un endroit où on choisit de mourir dignement. Cette révélation pousse Louisa à abandonner le travail qu’elle effectue auprès de Will. Mais aussitôt, la mère de Will, Camilla, supplie la jeune fille de reprendre ses fonctions auprès de son fils qui, avec elle, s’adoucit et semble plus heureux. Louisa accepte mais fixe ses conditions : elle a 6 mois pour enlever à Will l’envie de pratiquer un suicide assisté. Pour ce faire, elle va lui proposer des sorties et des activités qui devraient lui plaire et demande à bénéficier d’un budget illimité pour mettre ces dernières en place.  Certaines activités rencontreront un franc succès, d’autres, beaucoup moins. Au fil des jours, une grande complicité va unir Louisa et Will et bientôt, encore plus car affinités. Jaloux, le petit ami de Louisa, Patrick, obsédé par la course à pied et les marathons, lui demande de s’installer avec lui. Louisa accepte mais ce changement d’adresse ne change en rien l’inclination qu’elle éprouve pour Will. Un jour, ce dernier décide d’assister au mariage de son ex, Alicia qui épouse Ruppert, son ex-meilleur ami. Ce jour-là marque un rapprochement entre lui et Louisa qui lui propose de partir en voyage. Elle a tout d’abord l’intention d’emmener Will faire des activités de pleine nature en Californie, dans le parc du Yosémite. Mais ce dernier est victime d’une pneumonie et doit être hospitalisé. Qu’à cela ne tienne ! Louisa décide d’emmener Will sur l’île de la Réunion où les deux tourtereaux s’échangent un premier baiser. Cependant, Louisa découvre avec effroi que Will n’a pas renoncé à avoir recours au suicide assisté en Suisse. Il lui demande même de l’accompagner dans ce voyage où il vivra ses derniers instants. Effarée, la jeune fille décide de tout laisser tomber : cette requête est trop difficile à supporter. Cependant, elle finira par assister Will dans ses derniers instants. Après le décès de Will, la jeune fille héritera de lui et pourra prendre un nouveau départ dans la vie.

          Avec Avant toi, Jojo Moyes signe une sorte de roman « pour nous les filles » revisité. En effet, elle nous sert ici une bluette au scénario téléphoné – c’est-à-dire prévisible. On se doute, dès le départ, qu’entre Will et Louisa va naître une histoire d’amour. On se doute aussi qu’ensemble, ils se paieront une petite virée sous les tropiques dès lors que Louisa prend la décision de sortir Will de son trou. Par contre, on se demande jusqu’au bout si Will ne va pas se laisser convaincre de renoncer au suicide assisté.

          En outre, le roman joue à fond sur le pathos puisqu’il propose une histoire d’amour à la fois impossible et possible entre une personne valide et un tétraplégique totalement impotent. Il met également sur la table l’espoir qu’entretient jusqu’au bout Louisa de réussir à convaincre Will de ne pas avoir recours au suicide assisté. A cela s’ajoute l’histoire d’une blessure cachée de Louisa : elle a été violée par plusieurs garçons, un soir de bringue, alors qu’elle était étudiante et bourrée. Bien évidemment, c’est Will, le tétraplégique, qui change la vie de Louisa – échanges de bons procédés – et qui aide la jeune fille à surmonter cette blessure. Grâce à Will, Louisa réussira à prendre sa vie en main, réussira à la convaincre également qu’elle doit vivre chaque moment de sa vie avec intensité. Ainsi, à la fin du roman, Louisa décide de se lancer dans des études de stylisme.

          Par ailleurs, le roman comporte des longueurs. Par exemple, citons la virée à l’hippodrome, première sortie décidée par Louisa pour sortir Will de sa neurasthénie. Cette sortie s’avère être catastrophique ; rien ne se passe comme prévu et l’ensemble se solde par une totale bérézina. On aurait pu faire court, car raconter en long et en large toute cette affaire n’offre finalement pas grand intérêt. Mais le récit de la virée à l’hippodrome prend des pages et des pages. Le but ici de l’auteure, c’est de faire bien prendre conscience au lecteur de la difficulté de se mouvoir avec un fauteuil roulant ultra-médicalisé, surtout lorsque les infrastructures sont insuffisantes, qu’il pleut et qu’il y a de la boue.  Ainsi, une petite sortie qui s’avère être  toute simple lorsqu’on est valide devient une véritable épopée lorsqu’on est handicapé. Cependant, point n’était besoin de raconter de manière aussi lourde tous les détails rocambolesques de cette petite virée. Au bout de cinq minutes, le lecteur a compris où Jojo Moyes voulait en venir et il a envie de dire « basta ».

          A cela s’ajoute un humour un peu bêbête, style petites gaffes, petites maladresses « oups ! », et une écriture sans saveur, typique de ce genre de roman, où fourmillent les dialogues sans intérêt du style « passe-moi le pot de confiture » dont le seul but est de vouloir « faire vrai ».  l’ensemble est totalement insipide et inoffensif.

          Ainsi, selon moi, on peut passer son chemin quant à lire Avant toi. Petite info pour les amateurs du genre, Jojo Moyes a écrit un autre roman intitulé Après toi. Certes...