LECTURES VAGABONDES

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Elisabeth Bourgois : Je m’appelle Marie / Marie n’appelle pas !

         

         On ne compte plus les romans qui prennent Jésus pour sujet (on peut trouver mes remarques sur certains d’entre eux sur ce blog). Les œuvres qui s’intéressent à sa mère, Marie, sont nettement moins nombreuses. Ainsi, en ces temps qui mettent la femme en avant, Elisabeth Bourgois écrit ce petit roman sur la vierge ; il s’intitule Je m’appelle Marie et parait en 2017 aux éditions du Cerf.

 

            Dois-je vraiment résumer la vie de Marie ? Oui, si on en apprend plus sur elle. Non si on s’en tient à ce qui est communément connu à son sujet. Malheureusement, le roman qu’a écrit Elisabeth Bourgois s’inscrit dans le second cas. Ainsi, on commence par l’ange Gabriel qui vient annoncer à Marie qu’elle sera la mère du messie. Son époux, Joseph, hésite à la prendre pour femme car il la croit impure. Finalement, grâce à une intercession divine, il prend acte du rôle qu’il aura à jouer auprès de son futur fils, Jésus.     Bien évidemment, il y a la naissance de Jésus dans l’étable où Joseph et Marie ont dû se réfugier ; en effet, la ville de Bethléem est saturée par les gens venus se faire recenser. Plus tard, les rois mages viendront s’incliner devant le nouveau-né, déclenchant ainsi le massacre des innocents, décidé par le roi Hérode. Jésus grandit donc à Nazareth et comprend assez vite la mission à laquelle il devra vouer sa vie. Marie et Joseph l’acceptent. C’est vers l’âge de 19 ans qu’il se fait baptiser : Jean le Baptiste est là, dans le Jourdain et lui ouvre la voie. Après le baptême, Jésus se rend dans le désert où il jeûne et prie pendant 40 jours. À son retour, il est changé aussi bien physiquement que moralement. Il part et commence le périple au cours duquel il enseignera la parole de dieu et fera tous les miracles qu’on connait. C’est au moment de la Pâque juive que Jésus se rend à Jérusalem, là où s’accomplira sa passion. En effet, les juifs intégristes voient d’un mauvais œil cet homme qui prêche, qui blasphème – il se dit être le messie - qui agite et trouble l’opinion publique. Après le dernier repas qu’il prend avec ses apôtres, il sera arrêté au jardin des oliviers puis mené devant le Sanhedrin et Ponce Pilate. Il sera condamné à être crucifié et ne sera pas gracié. Il mourra sur la croix. Sa mère, Marie, assiste à son supplice, agenouillée devant son fils agonisant. Après sa mort, on le place dans un tombeau duquel il disparait. Il est ressuscité ! Il apparait à ses apôtres et leur enseigne ce qui sera désormais leur mission : porter la parole de dieu comme lui-même l’a fait. Marie vieillira auprès de Jean, que Jésus considérait comme son frère. C’est auprès de lui qu’elle mourra. Son fils Jésus redescendra encore une fois des cieux pour venir la chercher et l’emporter au royaume de dieu.

 

          Je m’appelle Marie, est-ce vraiment un roman ? En tout cas, l’œuvre est ainsi classée. Il n’empêche qu’elle est très décevante car très courte, ne fouillant pas le personnage de Marie qui reste sans personnalité. En effet, Elisabeth Bourgois s’intéresse plutôt à son parcours de mère qui concerne la moitié du roman. Ce dernier commence donc avec l’annonce de la conception, annonce faite par l’ange Gabriel jusqu’au moment où Jésus décide de partir accomplir sa mission. Ensuite, Marie va suivre son fils de loin et la fin du roman est alors menée au pas de course. Par conséquent, une sensation de déséquilibre se fait sentir entre la première et la seconde partie.

          Par ailleurs, il semble que le but d’Elisabeth Bourgois dans ce roman, c’est de rapporter des légendes sans les revisiter, sans les remettre en cause. Bien plus, les grandes scènes classiques où apparaissent Marie (la nativité, par exemple, ou encore la descente de croix où elle se lamente en tenant son fils entre ses bras (on songe aux nombreuses piétas qui existent dans le monde de l’art) ne font même pas l’objet d’un soin particulier, Quant à la scène de l’assomption, c’est affligeant ; on se croirait devant un tour de passe-passe, ou un tour de magie qui n’a rien de mystique, rien de divin. Bref, Marie est un personnage sans envergure aucune.

          Certes, Elisabeth Bourgois a bien essayé d’introduire d’autres personnages féminins : Véronique - la mariée des noces de Canaa et qui récupère le saint suaire sur le chemin du calvaire – ou encore Rachel, celle qui a hébergé Marie alors qu’elle est en passe d’enfanter et qui a suivi Jésus au moment de son calvaire… et bien sûr, la prostituée Marie-Madeleine. Ces femmes sont certes présentées rapidement dans quelques scènes, mais ne sont que des fétus de paille.

          Par manque d’inspiration en ce qui concerne le personnage de Marie, Elisabeth Bourgois s’est donc intéressée, dans la seconde partie de son roman, à Jésus...au pas de course comme je l’ai déjà dit !Là encore, c’est très superficiel et à la limite du hors sujet. Heureusement que l’auteure signale que Marie suit son fils dans sa mission, sinon, elle aurait été totalement oubliée, balayée ! Dans cette partie comme dans tout le reste, Elisabeth Bourgois s’en tient plutôt aux miracles et autres tours de passe-passe qu’à la véritable spiritualité de Jésus.

          En bref, Elisabeth Bourgois nous raconte ici une histoire merveilleuse qui ressemble à un conte pour enfant avec tous les éléments surnaturels qu’on connait : l’immaculée conception, les noces de Canaa, l’assomption, la résurrection, tout y est ! Bonne nuit les petits !

          N’empêche que Je m’appelle Marie n’a plus aucun intérêt lorsqu’on a fini le catéchisme et qu’on a 12 ans.

Pour couronner le tout, les dialogues sont lamentables ! En voici un petit exemple, au hasard :

 

- Ben, il y a des anges qui nous ont dit que le sauveur était né alors nous sommes venus pour l’adorer,.. voilà

 

          Elisabeth Bourgois est une scénariste. Son roman manque de texture et de profondeur et se présente comme un scénario, un canevas. D’ailleurs, ce roman est adapté du spectacle qu’elle a monté et qui porte le même titre. Nous n’irons pas jusqu’à penser qu’elle a bâclé le roman, histoire de surfer sur le succès du spectacle et récolter encore quelques marrons chauds… Quoique !



30/12/2022
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