LECTURES VAGABONDES

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David Trueba : Savoir perdre/Perd-on son temps à lire un tel roman ?

 

Après avoir lu et apprécié Quatre garçons dans le van de David Trueba, je poursuis ma découverte de cet auteur avec Savoir perdre, roman qui paraît en 2010 en France, aux éditions Flammarion.

 

Le roman raconte les itinéraires croisés de plusieurs personnages liés les uns aux autres par des sentiments amoureux ou des rapports familiaux. Les plus âgés se nomment Léandro et Aurora. Cette dernière, atteinte d’une maladie incurable, vit ses derniers mois, voit ses forces décliner et son corps se détériorer. Etrangement, son mari, Léandro, va voir régulièrement une prostituée prénommée Osembe. Il ne tarde pas à être totalement

obsédé par celle-ci. Lorsqu’elle disparait de la maison close où elle travaille, Léandro ne tarde pas à la retrouver et à reprendre ses relations tarifées avec elle. Mais un jour, alors qu’il retrouve Osembe dans un appartement que lui prête un ami, il est agressé par l’amant de celle-ci ; Léandro est passé à tabac, l’appartement est dégradé. Autre personnage important de Savoir perdre : le fils de Léandro nommé Lorenzo. Arnaqué par son collaborateur Paco, il perd son emploi et tue ce dernier. S’ensuit une existence chaotique dans laquelle il se lie avec une émigrée qui vit dans son immeuble : Daniela. L’idylle tournera court mais Lorenzo continuera à travailler – il est déménageur - avec Wilson, un ami de Daniela. Reste la benjamine de la famille : Sylvia. Encore lycéenne, Sylvia est, un jour, percutée par une automobile ; au volant, un dénommé Ariel, attaquant d’origine argentine dans une équipe de football madrilène. Une idylle se noue entre ce dernier et la lycéenne. Cependant, on estime, en haut lieu, qu’Ariel est insuffisamment performant et le joueur est transféré en Angleterre. Même si l’affaire s’avère être difficile, nos deux tourtereaux se disent adieu.

 

Avec Savoir perdre, David Trueba réussit le pari d’écrire un roman-fleuve où gravitent de très nombreux personnages. Certes, l’ensemble est construit sur les membres d’une famille durant trois générations, mais chacun s’inscrit dans un univers particulier habité par différents acteurs. Avec Sylvia, par exemple, nous pénétrons le monde adolescent du lycée : les élèves de la classe, les copains, les professeurs ; par ailleurs, alors qu’elle devient la maîtresse d’un footballeur professionnel, elle découvre aussi un univers adulte entre chambres d’hôtel et voyages-éclair à droite et à gauche.

Cependant, l’ensemble de ce roman est parfois assez indigeste car, comme je l’ai dit, il s’agit d’un « roman-fleuve » : la longueur de l’œuvre est aussi le fruit de nombreuses longueurs narratives. Ainsi, l’intrigue de savoir perdre évolue lentement, et oscille entre répétitions et épisodes insignifiants. On est d’ailleurs étonné du fait qu’au début du roman, Lorenzo tue Paco, le collaborateur qui l’a escroqué. Cependant, l’affaire n’a presqu’aucune suite : Lorenzo devient déménageur et Paco puis l’intrigue policière que la mort de ce dernier rend possible, sont bien vite escamotés, oubliés au profit du petit train-train quotidien dans lesquels notre déménageur évolue : l’immeuble où il habite et où il fréquente une voisine nommée Daniela, l’immeuble dans lequel sa mère, Aurora, est en train de mourir, les immeubles où il se livre à son activité de déménageur.     

En outre, je me suis singulièrement ennuyée à la lecture des chapitres consacrés à Ariel, le footballeur professionnel. Avec ce dernier, nous pénétrons au cœur de l’univers du football espagnol, entre les matchs, les entrainements, les relations et les négociations avec la direction du club, mais aussi les déplacements de l’équipe en autobus, les fiestas entre joueurs. Et je dois bien avouer que le football m’ennuie prodigieusement dans la vraie vie. Quel malheur de retrouver copieusement cet univers du football dans la trame d’un roman que je lis !

Mais que ces quelques critiques ne vous empêchent pas de vous laisser tenter par Savoir perdre. Même si on ne retrouve pas ici l’humour qui caractérise d’autres romans de David Trueba (je pense à Quatre garçons dans le van), l’écriture y est envoûtante et on est touché et happé par ces différents personnages que l’on découvre dans leur solitude puisque chacun fait l’objet de chapitres individuels qui s’enchainent : même s’ils font partie de la même famille, Léandro, Lorenzo et Sylvia se rencontrent peu et mènent leur vie séparément, en taisant aux autres ce qui leur arrive. Tous sont confrontés à la fragilité des relations humaines et aux difficultés qu’elles impliquent. D’abord, nous avons Léandro qui accompagne son épouse dans ses derniers moments tandis qu’il fréquente assidûment une prostituée qui ne l’aime pas. Ensuite, nous avons Lorenzo qui débute une relation avec Daniela, liaison qui tournera court. Enfin, il y a Sylvia qui noue une liaison amoureuse avec un joueur de football professionnel. Mais les empêchements sont nombreux et le roman se termine sur une rupture probable entre nos deux amoureux.

Alors, il me reste à découvrir le premier roman de Trueba, que j’espère dans la même veine humoristique que Quatre garçons dans le van. Ce roman s’intitule Ouvert toute la nuit.  

 



09/03/2020
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