LECTURES VAGABONDES

LECTURES VAGABONDES

Christopher Bollen : Manhattan people/Manhattan’s song.

 

 

          Certes, Manhattan people n’est pas le premier roman sur la mythique et fascinante ville de New York mais c’est le premier roman d’un écrivain déjà bien connu – si j’en crois la quatrième de couverture – dans les milieux artistiques de la ville. Christopher Bollen a donc écrit Manhattan people en 2011 et le roman parait en France en 2016 aux éditions Calmann-Lévy. 

 

          L’intrigue de Manhattan people se déroule bien évidemment à New York, sur environ trois mois. Nous allons suivre le parcours de plusieurs personnages qui ne sont pas originaires de la ville mais tentent de s’y implanter pour y faire carrière. Del et Joseph viennent de se marier : le mariage n’était pas vraiment dans leurs intentions mais la jeune femme, originaire de Grèce, a besoin de la green card pour poursuivre sa carrière : elle travaille dans un zoo, avec les serpents. Joseph, quant à lui, veut devenir comédien. Certes, jusqu’à présent,  il n’a eu à se mettre sous la dent que des rôles dans la publicité, mais il espère mieux, très vite. Un de ses amis se prénomme William ; il a les mêmes intentions, mais sa carrière semble plus difficile à démarrer. De son côté, Del a aussi une amie : Madie. Son frère, Raj est d’ailleurs l’avant-dernier amant de Del. Mais un drame va se jouer, drame qui va à la fois rapprocher et séparer nos personnages. Madie meurt ; elle est renversée dans la rue, par une voiture qui prend la fuite. A son volant, il y a William. Affolé, le jeune homme trouve refuge chez un ami, un homosexuel prénommé Quinn. Ce dernier veut prévenir la police, mais William prend peur et tue Quinn puis le laisse pourrir dans son appartement, pendu à sa douche. Désemparé, il trouve refuge chez Joseph, le mari de Del. De son côté, Del se rapproche de Raj qu’elle aime toujours. Il faut dire que Joseph est très bizarre ces deniers temps. En effet, il a peur de mourir d’une crise cardiaque : cette crainte, il la nourrit depuis bien longtemps, car tous ses ancêtres sont morts à l’âge qu’il va atteindre, d’une crise cardiaque. Il se confie à une femme - Aleksandra – avec laquelle il entretient des relations ambigües. La jeune femme est veuve : son mari a été assassiné et elle vit à New York dans un hôtel, prête à fuir car elle est paranoïaque. Joseph et Aleksandra conjuguent leurs peurs et se réconfortent. Mais il s’avère que le mari d’Aleksandra a été tué par Aleksandra herself ! De plus, Joseph est le sosie de ce mari ! Les choses risquent fort de tourner vinaigre pour Joseph qui heureusement, se confie à son épouse, Del. La jeune femme décide de rompre avec Raj pour se consacrer à la « résurrection » de Joseph car elle ne croit pas en la fatalité familiale de la crise cardiaque. Tandis que William retrouve l’amour avec le seul témoin de l’accident qui a causé la mort de Madie et se voit blanchi miraculeusement des deux meurtres qu’il a commis, Del et Joseph décident d’aller vivre sur l’île natale de Del – Amorgos en Grèce. Mais c’est sans compter le destin : Aleksandra se tient tapie dans l’ombre : elle assassine Joseph. C’est donc seule que Del part en Grèce alors qu’elle attend un enfant de Joseph et craint de transmettre à ce dernier la malédiction qui frappe tous les membres masculins de la famille de son géniteur.

 

          Le thème principal du roman  c’est le rêve américain de la réussite qui s’incarne particulièrement dans une des villes américaines où tout semble possible : New York.

          Nous allons suivre différents personnages : certains sont originaires d’autres états ; certains, d’autres pays. Mais aucun n’est originaire de New York. Chacun va vivre un itinéraire solitaire dans la ville : Joseph, aspirant acteur, tente, dans cette ville, d’échapper à la malédiction familiale ; en effet, son père, son grand-père, sont morts d’une crise cardiaque à l’âge de 34 ans. Mais comme dans une tragédie classique, alors qu’il pense avoir échappé à la mort, la malédiction le rattrape et c’est la main de celle avec laquelle il cherchait à la conjurer cette malédiction qui le frappe : Aleksandra.

          Del, de son côté, voudrait obtenir la fameuse green card qui lui permettrait de s’installer définitivement aux Etats-Unis. Elle travaille dans un zoo où elle s’occupe des serpents ; particulièrement des serpents diamantins. On y voir, dans cet intérêt porté aux reptiles si mal-aimés, une métaphore de tous ces immigrés si mal acceptés aux Etats-Unis. Ces personnages et les autres sont à New York pour y réaliser leurs rêves. Mais aucun n’y arrive. Finalement, ils quittent tous la ville, déçus, sauf celui qui est prêt à tout, celui qui a tué, celui pour qui la fin justifie les moyens : William.

          De manière générale, ces personnages et les autres errent dans les rues de la ville, en solitaire, perdus au milieu d’autres individus qui, eux aussi déambulent à travers l’espace urbain, en ressassant leurs désirs, leurs espoirs, leurs angoisses et leurs déchirures.

          Pourtant, paradoxalement, les itinéraires de tous les personnages vont se lier et le roman avance en se concentrant vers un huis-clos étonnant : William, ami de Joseph, tue accidentellement Madie, amie de Del. Sans que personne ne soit au courant de son méfait, il vient s’installer pendant quelques jours chez le couple Joseph-Del, y semant le trouble. Finalement, il va nouer une relation amoureuse avec le seul témoin de son crime qu’il rencontre par hasard dans les rues de New York.    

          Ainsi, tous auront vécu des situations hors-normes, comme si à New York, la vie normale était impossible, comme si c’était la ville de tous les délires, de toutes les démesures, de toutes les névroses.

          Ainsi, nous sommes face à un roman aux multiples facettes où l’épopée existentielle de chaque personnage se mêle au thriller et à la tragédie ou au drame. Certes, il y a des longueurs et parfois, on a l’impression que l’intrigue s’effiloche, qu’elle manque de cohérence car les différentes veines se conjuguent parfois difficilement. Finalement, aucune vision précise de New York ne se dégage de ce roman trop ambitieux qui s’égare dans diverses directions ; mais peut-être est-ce là la clef de l’ensemble… New York étant la ville de tous les égarements.



13/07/2020
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