LECTURES VAGABONDES

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Arto Paasilinna : Petits suicides entre amis/Vive la grande vie !

 

 

          Voici un titre qui laisse présager une bonne dose d’humour noir ! Petits suicides entre amis est écrit par un écrivain finlandais - Arto Paasilinna – en 1990 et publié en France en 2003 aux éditions Denoël.

 

          Onni Relonnen, ruiné, est au bout du rouleau. Il décide d’aller se suicider dans la grange, non loin de sa maison. Là, il rencontre Hermanni Kemppainen, lui aussi désespéré et décidé à se pendre dans la même grange. Les deux hommes font connaissance et décident d’organiser un grand suicide collectif. Pour ce faire, ils font paraître une annonce dans le journal afin de recruter des candidats au suicide. Les réponses sont tellement nombreuses que les deux hommes décident de s’offrir les services d’une secrétaire, elle aussi candidate au suicide : Helena Puusaari. Puis, ils ont l’intention d’organiser un grand symposium afin que tous les candidats au suicide puissent venir parler de la mise en œuvre de leur mort prochaine. Ils se retrouvent tous au restaurant des vieux chanteurs. Tandis que le repas va bon train, certains, pourtant, partent. Restent une poignée de suicidaires, bien déterminés à passer à l’acte ensemble. Ils s’octroient les services d’un autocariste, Rauno Korpela. Et voilà la petite troupe en route pour le cap le plus au nord de la Suède, endroit idéal pour faire un vol plané du haut de la falaise. Mais avant, ils sillonnent la Finlande en quête d’autres candidats au suicide. L’autobus se remplit et la gaieté est de mise : les voyageurs passent leur temps à manger, à rire et à boire. Lorsqu’ils arrivent à destination, la décision de se suicider en se jetant dans le vide semble avoir pris un coup dans l’aile. Tous les voyageurs tirent le signal d’alarme et le bus se bloque à quelques centimètres de l’issue fatale. Ensemble, ils décident de partir dans les Alpes Suisses, là où se trouvent des ravins vertigineux, endroit idéal pour un suicide collectif. Cependant, les voyageurs connaissent sur leur chemin quelques embrouilles avec les habitants – notamment en France. La cause est qu’ils boivent trop, qu’ils sont bruyants et qu’ils dérangent ceux qui veulent vivre tranquille. Pendant ce temps, des relations amoureuses se nouent au sein de la troupe. Plus l’autocar va, plus l’envie de se suicider défaille. Ce n’est ni dans les Alpes Suisses, ni au cap sud du Portugal qu’ils passent à l’acte car alors, les voyageurs trouvent ici ou ailleurs, un endroit qui leur plait, où ils pourront continuer leur vie. Finalement, c’est l’inspecteur de la sûreté Rankkala qui trouve la mort, anéanti par ses aigreurs d’estomac provoquées par la délirante enquête qu’il a dû mener pour retrouver le groupe de suicidaires qui sèment la pagaille sur leur route.

 

          Avec Petits suicides entre amis, Arto Paaslinna signe un roman amusant, plein de truculence. Assez vite, le lecteur est embarqué dans une sorte de road-movie bien joyeux même si les personnages ont comme caractéristique commune d’être tous suicidaires. Ainsi, Petits suicides entre amis fonctionne comme un roman picaresque : les personnages, en goguette, sillonnent les routes de différents pays où il leur arrive des aventures cocasses et ils rencontrent d’autres personnages avec lesquels ils peuvent avoir des démêlés ou des discussions : ainsi, parfois, les histoires des uns s’imbriquent dans les histoires des autres comme dans tout bon roman picaresque. 

          Mais Petits suicides entre amis, c’est aussi une ode à la nature : nos personnages tous issus d’un monde urbain où les rapports avec les autres sont parfois compliqués et douloureux, découvrent du pays et notamment la nature et ses merveilles : là, ils s’extasient sur la beauté du monde qu’il serait idiot de quitter si tôt, alors qu’il y a tant de ressources nouvelles à découvrir.

          Bien évidemment, le roman propose également une ode à la vie à travers une réflexion sur le suicide : la motivation du futur suicidé est-elle vraiment profonde ? Ne peut-on pas changer les choses en prenant du large ? en laissant de côté la raison qui pousse l’individu au suicide – peines de cœur, peines d’argent, licenciement… - et en coupant les liens avec la vie qui meurtrit pour en découvrir une autre beaucoup plus douce et agréable ? Certes, il faut faire confiance à la vie et à ses ressources : elle est ce qu’il y a de mieux, le plus beau don du ciel. On peut certes échapper à la déprime grâce aux autres, à l’amitié, voire à l’amour ; plusieurs personnages vont finir par s’installer ici ou ailleurs, dans des endroits que le périple leur a fait découvrir.

          Petits suicides entre amis est donc un roman truculent, vivifiant et réconfortant. Il nous amuse le temps d’une lecture et nous fait aussi réfléchir à la manière d’un petit conte philosophique optimiste, avec néanmoins la petite cruauté finale qui amuse plutôt qu’elle ne déprime : les suicidaires qui sèment la pagaille sur la route auront eu raison de la santé de l’inspecteur chargé de l’enquête sur leur curieuse troupe !



28/02/2021
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