LECTURES VAGABONDES

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Adam Haslett : Imagine que je sois parti/Imagine que je ne te lise pas…

         

    « Imagine que je n’aie pas lu ton roman, Adam ! »  - « Mais tu aurais loupé quelque chose ! Assurément !» me répondrait l’auteur. Eh bien, il s’avère que je l’ai lu, ton roman, Adam. Alors est-ce que c’était si bien que tu le dis ? C’est ce que nous allons voir. Adam Haslett a écrit Imagine que je sois parti en 2016 et le roman parait en 2017 aux éditions Gallimard.

 

              Margareth épouse John pour le meilleur et pour le pire. Certes, le couple aurait voulu vivre en Angleterre, mais le travail de John le retient sur la côte est des Etats-Unis. Ensemble, ils conçoivent trois enfants : Michael, Alec et Célia. Mais à l’adolescence, un premier éclatement survient : Michael décide de poursuivre ses études en Angleterre. Il a deux passions : étudier tout ce qui est en rapport avec l’esclavage des noirs et la musique disco – et plus tard, tout ce qui en découle : funk, dance, etc… Un second éclatement a lieu lorsque le père, John, décède. Ce dernier a d’ailleurs dégringolé durement à la fin de sa vie puisqu'il est la proie, régulièrement, de sévères dépressions. A l’âge adulte, Michael vit en collocation avec son ami Ben et connaîtra deux amours avec des filles lesbiennes. La première se prénomme Caleigh, la seconde, Béthany. Ces deux histoires seront des échecs. Côté professionnel, Michael hésite entre les études (et une thèse sur l’esclavage des noirs) et de petits boulots instables dont certains sont en rapport avec sa grande passion pour la musique. Rattrapé par le même syndrome que celui auquel a succombé son père, Michael est en proie aux angoisses, aux délires, à la dépression, devient accro aux médicaments et, dans une certaine mesure, à l’alcool. De leur côté, son frère, Alec, et sa sœur, Célia, sont, eux aussi, en pleine interrogation existentielle. Alec, journaliste free-lance, est homosexuel et n’a pas de liaison stable ; lorsqu’un jour, il rencontre Seth avec lequel il finira par s’installer. Célia, psychologue, vit avec Paul et tous deux hésitent à se marier. Après un avortement, ils décideront de se lancer dans la grande aventure du mariage. Cependant, avant ce happy-end pour le frère et la sœur de Michael, un drame les bouleversera. Michael revient aux Etats-Unis en bien piètre état. Accro aux médicaments, il sera hospitalisé, puis vivra quelques temps avec sa mère avant de se retrouver avec son frère, Alec, dans le chalet des vacances de leur enfance. Là, Alec se charge de désintoxiquer Michael. Mais l’affaire tourne mal : Michael boit et sera retrouvé mort, un matin, sur le canapé : overdose d’alcool. L’heure est au deuil, mais, comme on l’a vu, les uns et les autres finissent par trouver leur voie, sans oublier Michael.

 

              Imagine que je sois parti se construit comme un roman polyphonique ; les uns après les autres, Célia, Margareth, Alec, Michael et même John, le père vite décédé, prennent successivement la parole pour raconter leur vie personnelle, mais aussi familiale. Le roman commence le matin de la mort de Michael ; mais très vite, on plonge dans l'histoire de l’enfance de la fratrie et les faits se succèdent de manière chronologique jusqu’à un an après la mort de Michael.

              J'aime plutôt bien ce genre de construction romanesque à plusieurs voix, mais en ce qui concerne Imagine que je sois parti, je dois bien avouer que je me suis ennuyée. D'abord, on ne peut échapper à la sensation du déjà lu. En effet, la psychanalyse d’une famille à travers ses individualités est un thème à la mode. Avec Imagine que je sois parti on plonge dans les affres psychologiques - et même psychotiques - d’une famille marquée dans ses gènes par la dépression du père. Alors on a droit aux états d’âme de chacun : aucun d’entre eux ne réussit à trouver sa voie ; ils sont tous marqués par la rupture d'avec le père – rupture due à son décès - d'avec le frère – parti étudier en Angleterre - et la culpabilité… terme très à la mode et qui vaut pour tous les mal-être.

              Le roman comporte de longs passages analytiques – et terriblement ennuyeux - sur la musique Disco ; en effet, Michael conçoit une grande passion pour Donna Summer, et plein d’autres musiciens qui ne sont connus ni d'Eve ni d'Adam, et dont le lecteur se fiche totalement. On plonge également dans des moments où Michael délire :  pourquoi pas ? Sauf qu'alors, le texte n'a plus ni queue ni tête et devient donc vite saoulant.

              Autre thème à la mode - et déjà lu -  : l’homosexualité. Alec est gay et baise avec n’importe qui. Il aime le sexe  - comme tous les homos qu'on rencontre dans les romans. Il ne cherche pas vraiment l’amour, mais finira par le trouver en la personne de Seth et se rendra compte que cet homme le rend heureux. L’homosexualité se retrouve sous une autre forme avec le personnage de Michael qui s’amourache exclusivement de lesbiennes. Cependant, on sent que l’auteur se sent proche du personnage d’Alec… Sans doute Adam Haslett est-il lui-même homosexuel et même s'il a l'ambition  de traiter ici de la dépression, il ne peut s'empêcher de parler de lui à travers un personnage annexe qui prend progressivement toute la place... à tel point que le roman évite de peu l’écueil de l’incohérence ; on se demande alors si le vrai thème du roman ne va pas basculer vers  celui de l’homosexualité d’Alec, et abandonner celui de la dépression d’un frère et de l’amour d’une famille autour de lui. Quant au personnage de Célia, c'est une femme, hétéro qui plus est ; ce personnage n'intéresse visiblement pas l'auteur et s’avère être bâclé. 

              Bref, on s’ennuie dans ce roman que j'ai bien envie de réserver à la seule communauté gay, masculine, bien évidemment. 

 

 



12/06/2022
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