LECTURES VAGABONDES

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Herman Koch : Villa avec piscine/Pénible plongeon.

         

          On adore les huis-clos autour d’une piscine depuis le chef d’œuvre fiévreux de Jacques Deray – La piscine - mettant en scène dans une atmosphère lourde et étouffante le couple magnifique composé d’Alain Delon et de Romy Schneider. Dans un autre genre, le mystérieux Swimming pool de François Ozon n’est pas mal non plus. Alors que dire de Villa avec piscine, le roman d’Herman Koch paru en 2013 aux éditions Belfond ?

 

          Le renommé docteur Marc Schlosser vit une période chaotique : convoqué par le conseil de l’ordre, il est accusé d’avoir posé un mauvais diagnostic qui a entrainé la mort de son ami, le célèbre acteur Ralph Meier. Judith, l’épouse de Ralph, soupçonne fortement Marc d’avoir voulu cette mort et de l’avoir provoquée. Pourtant, elle ne fut pas toujours indifférente au charme du médecin. Petit retour en arrière. C’est les vacances d’été et Marc, qui n’est pas indifférent au charme de Judith, la femme de son ami Ralph, décide d’aller planter sa tente près de la villa où le couple passe ses vacances. Bien évidemment, les deux couples se rencontrent et Judith invite Marc et toute sa famille – son épouse, Caroline, et ses deux filles, Julia et Lisa – à venir s’installer dans leur villa de vacances. Trois couples se retrouvent donc autour de la piscine, tous les jours, pour jouer ensemble : Marc et Caroline, Judith et Ralph, mais aussi un autre couple d’amis : Stanley et Emmanuelle. Les filles de Marc, Julia et Lisa, sympathisent avec les fils de Judith et de Ralph : Alex et Thomas. Toujours entre deux verres d’alcool glacé, Marc éprouve de l’agacement en observant Ralph qui exhibe son anatomie masculine devant ses filles et balance des plaisanteries salaces à tout bout de champ. Mais un soir, c’est le drame. Alors qu’elle est de sortie sur la plage avec Alex, Julia, la fille de Marc, se fait violer et ne se souvient plus de l’agression. Marc soupçonne Ralph d’être le violeur, d’autant plus qu’il apprend qu’un jour, ce dernier se serait livré avec les adolescentes à un strip-poker autour de la piscine. Mais peut-être aussi Stanley n’est-il pas si innocent qu’il en a l’air ? Il a pris des photos de Julia et lui promet un bel avenir de top-model en Californie. Après les vacances, alors que Ralph vient consulter son médecin, Marc, ce dernier, sous prétexte de prélever du tissu pour analyse, lui inocule des cellules graisseuses contaminées. La maladie va se développer rapidement et Ralph demande l’euthanasie, ce dont Marc se charge. Mais avant de mourir, Ralph avoue à Marc qu’il sait qui a violé sa fille Julia. Il s’agit du plombier venu à la villa réparer une fuite d’eau. Alors qu’il est soupçonné par ses collègues d’avoir organisé la maladie et le décès de Ralph, Marc décide de se faire oublier et se retrouve en Californie, autour d’une piscine avec toute sa famille ; cette fois, il a été invité par Stanley qui lorgne sur Julia… dans l’intention avouée d’en faire un top-model. Mais peut-être y a-t-il aussi là-dedans de l’inavoué ?

 

          Si ce roman tente de mettre en scène les désirs et les haines cachés des personnages, sentiments tellement dévorants qu’ils aboutissent au crime, à l’instar du fiévreux film de Jacques Deray, La piscine, ou encore Swimming pool de François Ozon, Villa avec piscine nous plonge dans un huis-clos poussif et languissant. Comme dans les films dont ce roman paraît s’inspirer, la veine sentimentale laisse bientôt place au drame, puis à une enquête, puis à une vengeance. Mais tout cela n’a ici que bien peu d’intérêt.  

          Le personnage principal, c’est Marc Schlosser, un médecin qui se transforme en criminel. Au passage, on soulignera la satire assez féroce et originale des docteurs entre les mains desquels nous remettons notre santé et par là, notre vie. Contrairement à l’idée que nous avons tous de ceux qui nous soignent (des experts sérieux et engagés corps et âmes dans l’acte de soigner), Marc Schlosser est dégouté par son métier, dégouté du corps humain qu’il trouve laid et repoussant. L’homme se focalise surtout sur le sexe des gens qu’il examine parfois et qui l’écœurent.

          Certes, on sent ce désir qui habite l’auteur, désir de jouer avec l’ambiguïté et le mystère, notamment au sujet du viol de sa fille, Julia. S’il tue son ami Ralph Meier, est-ce parce qu’il le soupçonne d’être le coupable, ou parce qu’il le déteste d’être aussi sûr de lui, aussi inébranlable, aussi cabot, aussi impudique ? Pour couronner le tout, Ralph se trimballe et se trémousse autour de la piscine avec le sexe à l’air. Beurk ! Quelle horreur dégoutante ! Mais ce jeu avec l’ambiguïté des sentiments et des raisons véritables qui poussent le bon docteur au meurtre est bien plat et on a plutôt l’impression de tourner en rond dans l’évocation languissante du farniente auxquels les personnages s’adonnent autour de la piscine et des verres d’alcool qu’ils ingurgitent.

           Enfin, la manière avec laquelle Marc Schlosser tue Ralph Meier est assez grandguignolesque puisque c’est en prélevant du tissu adipeux enflammé qu’il contamine des tissus sains voisins qui, par contagion, vont enflammer peu à peu toutes les cellules du corps de la victime. On se demande bien comment le brave docteur peut avoir l’idée de cette manipulation alors qu’il ne sait même pas de quoi son ami est atteint, que ce dernier vient le voir à brûle-pourpoint. Du grand n’importe quoi !

          Bref, Villa avec piscine, c’est un roman dont je déconseille la lecture, surtout si vous êtes en vacances autour d’une piscine ! Il risquerait de gâcher le plaisir qu’on peut éprouver lorsqu’on se lance dans un bon bouquin, allongé dans un transat, au soleil.



17/01/2021
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